Jean
Rollin, réalisateur " kulte " et paresseux –
les deux choses n’ayant jamais été absolument incompatibles en
soi – qui bavait volontiers sur le cinéma de Godard tout en ayant
passé pas loin d’un demi-siècle à refaire pas le même film
mais presque (un boudin, un nain, un clown, un ou une vampire, une horloge, un
cercueil, la mer, un boudin, un nain, un clown, un ou une vampire,
une horloge, etc.) avec des fortunes diverses, savait parfois, force
est de le reconnaître, s’entourer d’interprètes passionnants. En témoigne
la présence récurrente ou pas, selon les cas, dans son abondante
et inégale filmographie, de Michel Delahaye et Jacques Robiolles,
buveurs de sang géniaux (Le
Frisson des vampires, 1970), de R.J. Chauffard, gardien du
temple impavide (La Vampire
nue, 1969), de Paul Bisciglia, paysan sanguinaire (Les
Raisins de la Mort, 1977), de Bernard Musson, sorcier ébouriffé
(La Fiancée de Dracula,
1999), de Marie Laurence, religieuse émouvante (La
Fiancée de Dracula, id.), des incroyables Jean Aron, Willy
Braque et Maurice Lemaîte, ou encore de la captivante Dominique
Grousset, présente par intermittence du début (Requiem
pour un vampire, 1971) à la presque fin (La
Nuit des Horloges, 2006). Loin du pénible Thomas Smith (La
Fiancée de Dracula), de l’insupportable Jacqueline Sieger (Le
Viol du vampire, 1967) ou de l’éteint – et un peu flapi -
Jean-Loup Philippe (Lèvres de
sang, 1974), Louise Dhour, dont un site
ami consacré au cinéma bis a été le premier a
signaler sa disparition, était de ces artistes méconnu(e)s, rares
au propre comme au figuré, dont le souvenir semble réservé aux
seuls initiés. Et c’est dommage.
Buveuse de sang en cape de dominatrice fouettant le
chaland (Requiem pour un
vampire, 1971) ou touchante tenancière d’un saloon perdu au
fin fond de la Bretagne (Les Démoniaques,
1973), on la revit un peu plus tard dans une parodie coconne mais
thunée de film de vampire (décidément…) made in Gaumont. Dans Dracula
père et fils (Édouard Molinaro, 1976), Louise Dhour donnaît
l’espace d’une minute ou deux la réplique à Bernard « Jolie
Poupée » Menez, ce qui – forcément – n’ajouta pas
grand chose à sa gloire, du reste très relative, et on sait
qu’elle prêta également plus longuement ses traits à la sorcière
de L’Ampélopède
(Rachel Weinberg, 1973), œuvre fantastique quasi invisible
aujourd’hui. Mais pour ceux qui l’ont aimée chez Rollin, sa
belle et sensible présence laissera sur la pellicule une trace rien
moins que pérenne, ce qui est plutôt une bonne chose à l’heure
où la mémoire collective de tout ce qui a plus de dix ou quinze
ans d’âge semble condamnée à un étiolement lent mais définitif.
Un hommage bien plus circonstancié, éclairant les nombreuses zones
d’ombre du personnage, ses activités extra-cinématographiques et
ses liens privilégiés avec le Montparnasse déclinant des années
80 est accessible ici.
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