Décès
dans une absolution discrétion de l’ex-danseuse et comédienne d’origine
suisse Ursula Kübler-Vian (1925-2010), veuve du romancier, poète,
dramaturge et pataphysicien Boris Vian, épousé en 1954 et dont
elle s’était attachée, depuis un demi-siècle, à faire vivre l’œuvre
protéiforme s’il en fût. Si son entourage a avant tout salué
une personnalité à la fois " secrète " et
" pleine de fantaisie ", le Septième Art
conservera quant à lui, au prisme d’une vingtaine de rôles d’importance
variable, l’image d’une artiste élégante et racée, blonde
aristocratique croisée dans les ballets amoureux de celluloïd de
Pierre Kast (Le Bel Âge, 1958 ; Les Liaisons
amoureuses, 1960) ou d’Agnès Varda (Les Créatures,
1965), après avoir tenu son rang dans ceux, conçus pour la scène,
de Maurice Béjart et de Roland Petit. Pour mémoire, on rappellera
qu’elle avait débuté à l’écran, aux côtés de Boris Vian et
dans le rôle d’une jeune Suédoise, dans le court métrage de
Paul Paviot Saint-Tropez, devoir de vacances (1952),
traversé tel une comète le foisonnant French Cancan (Jean
Renoir, 1954) au début duquel on la croise(rait) furtivement en
danseuse de quadrille dans les séquences de " la Reine
Blanche ", et campé quelques années plus tard l’épouse
résignée (mais pas trop) de Marcello Mastroianni dans Vie
privée (Louis Malle, 1961). En 1971, réunissant une dernière
fois, ou presque, ses anciennes égéries, Françoise Brion et
Alexandra Stewart en tête, Pierre Kast lui permettait de rejoindre
le générique des Soleils de l’île de Pâques, variation
moderno-mystique sur le miracle de la Pentecôte transposé au XXe
siècle, dans lequel elle campait non sans subtilité l’épouse de
Maurice Garrel. Depuis ces adieux (prématurés) au grand écran,
Ursula Kübler, retirée à Eus dans les Pyrénées-Orientales, se
dépensait sans compter afin de faire perdurer (si besoin est…) la
mémoire de celui dont elle fut l’épouse cinq années durant. Au
final, le souvenir double de la " régente " du
Collège de Pataphysique créé en 1948 et de la cofondatrice d’une
la Fondation – devenue Fond’Action – Boris Vian destinée tant
à promouvoir l’œuvre colossale de son mari qu’à faire
connaître de jeunes talents, ne saura complètement occulter dans
les mémoires cinéphiles l’image de la comédienne subtile et
attachante qui s’impliquait si bien, entre humour et âpreté,
dans les premiers films (L’Écume des jours, Charles
Belmont, 1967) et le faisait, dans tous les cas, avec une classe
imparable. AdL.
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